vendredi 23 février 2018

Du Muscat en Iran

S’il y a bien un sentiment que je partage avec le photoreporter Pierre Muscat, c’est la fascination pour l’Iran.
Dans la plus récente édition du magazine WeDemain, parue le 22 février 2018 (ou sur abonnement payable en Bitcoin !), on découvre cinq photos prises dans le métro de Téhéran par Pierre Muscat. L’article qu’il signe mentionne le fameux « tarof », la courtoisie persane, bien réelle et délicieusement éprouvée. Mais quelques clichés se sont glissés dans ses descriptions d’une ville qui vit autant le jour que la nuit.

On ne parle pas de « souk » en Iran, mais de « bazar ». Le souk, on le trouve dans les pays arabes. Et le mot « bazar » que nous utilisons en français vient du vieux persan.
En Iran, prendre des photos dans la rue a été interdit sous le joug de Mahmoud Ahmadinejad, qui considérait l’appareil photo comme une arme de guerre. Depuis son départ, on peut tout photographier, sauf les lieux de haute sécurité. Comme en France. A Paris, dans le 7°arr., en novembre 2017, un policier m’a interdit de photographier l’extérieur la nouvelle église orthodoxe construite par J.M Wilmotte, sous prétexte de « monument sensible ».
Coca Cola n'a jamais quitté l'Iran ©Sylvie Bouny
Dessous chics, Grand Bazar de Téhéran ©Sylvie Bouny
Policiers, Téhéran ©Sylvie Bouny
Petite sieste au bazar d'Isfahan ©Sylvie Bouny
L’article pousse la caricature pour décrire les peintures murales des leaders politiques au style de « l’imagerie soviétique ». Je les vois moins angulaires, mais elles nous rappellent qu’islam rime indissociablement avec politique et que c’est ici aussi l’origine des dissensions avec l’occident.
Place Imam Khomeini ©Sylvie Bouny

Rappelons ici que Téhéran est la seule ville au monde qui a exposé pendant deux semaines dans ses rues sur 900 panneaux style JC Decaux 4x3 mètres des images des chefs d’œuvres de la peinture mondiale : 450 panneaux dédiés à l’art occidental et 450 panneaux réservés à l’art persan. Magritte, Cézanne, Rembrandt, Pollock, Bacon entre autres sans oublier « Le cri » de Munch. C’était en 2015.
L’initiateur de cet évènement est d’ailleurs Jamal Kamyab, l’actuel conseillé culturel en France et de son ami Mojtaba Mousavi, de la mairie de Téhéran.

Il y a plus de 50 ans, Farah Diba a constitué une étonnante collection d’art contemporain mondial. Elle a choisi des centaines d’œuvres en fonction des étapes artistiques franchies par leur auteur. En quittant le pays le 16 janvier 1978, elle s’est inquiétée du sort réservé à cette collection considérée comme inappropriée au regard des ayatollahs révolutionnaires.
Ils n’y ont pas touché, la conservant intacte. Excepté une toile, une seule. Un De Kooning qui représente une femme nue (en cherchant bien). La toile n’a pas été détruite, mais échangée contre une autre.
Depuis 2016, la collection est montrée par rotation d’œuvres au Musée d’art contemporain de Téhéran (dont la conception architecturale toute en béton revient au choix de Farah Diba). Des œuvres que personne n’avait plus vu depuis 1978.
Musée d'art contemporain, Téhéran ©Sylvie Bouny
Musée d'art contemporain, Téhéran ©Sylvie Bouny
Mais tout cela n’est que détails par rapport aux paroles tenues par Pierre Muscat sur France Inter, relatant que les soirées privées regorgeaient d’alcools, de vins. Les interdits absolus.
Même sous pseudonyme, la police iranienne sait parfaitement chez qui M. Muscat est allé. Que le stockage ou la consommation d’alcool en Iran mène directement à la case prison, sans échappatoire et pour de longues années. Du vin ? -En route pour Evin. Evin, la prison des prisons, creusée dans la montagne au nord de Téhéran. Non, Monsieur Muscat ! Quand on est fasciné comme vous l’êtes par l’Iran, on ne peut pas ignorer les risques incommensurables que l’on fait prendre à ses amis persans en parlant des interdits bravés à 5 heures de distance, pour la simple fanfaronnade.  


Vous avez choisi un pseudonyme pour publier ces photos du métro de Téhéran, pour vous garder le loisir d’entrer aux Etats-Unis d’Amérique quand il vous chante. Allez aux Usa maintenant, où les américains ont mal à leur présidence comme les iraniens ont mal aux effets désastreux de leur embargo.
Le tarof des Iraniens, Téhéran ©Sylvie Bouny

 Sylvie Bouny, le 23 février 2018





Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire